La réalité sociale est la source des films du réalisateur indépendant José Luis Tirado. Ses documentaires et fictions font voir l’espace urbain comme un lieu où se retrouvent le fossé et les tensions entre riches et pauvres. Les droits sociaux, la migration, la précarité, l’environnement ou la mémoire historique ont été les sujets de ses œuvres. Dans “Le festin en temps de peste” il nous montre une vision du monde du point de vue des déshérités.
Le film emprunte son titre à une pièce de théâtre d’Alexandre Pouchkine écrite en 1830, basée sur une scène du poème dramatique The city of the plague de l’auteur anglais John Wilson (1816). Plus tard, en 1900, les musiciens russes Cesar Cui et Sergei Prokofiev en tireront deux versions pour l’opéra.
Dans l’oeuvre de Pouchkine, dans un décor urbain, devant le peuple décimé par la peste, un groupe d’aristocrates, ecclésiastiques, bourgeois et hauts fonctionnaires rendent hommage à leurs amis morts, décimés eux aussi par la peste, tout en faisant ostentation de leurs richesses et de leurs privilèges. C’est un monde qui touche à sa fin, un monde auquel ils essayent de s’accrocher avec les traditions et le plaisir des sens.
Le film de Tirado a pour scénario la « feria de abril de Sevilla », l’ancienne foire aux bestiaux, à présent fête folklorique, de Séville. En un travelling plan-séquence, la caméra passe devant les portes des « casetas » privées, ces maisonnettes en toile édifiées à l’occasion, et où les privilégiés dansent, boivent et festoient sous la protection de grillages et de gardiens qui empêchent les pauvres d’entrer.